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Hypertension : une analyse mondiale du diagnostic, du traitement et du contrôle     

14 octobre 2021 9minutes

Le LIH contribue à améliorer les connaissances sur l’hypertension dans le monde   

Des chercheuses du Département de la santé de la population (DoPH) du LIH – à savoir les Dres Ala’a Alkerwi et Maria Ruiz-Castell et Mme. Gwenaëlle Le Coroller du Centre de Compétence en Méthodologie et Statistique (CCMS) du LIH et la Professeure Laetitia Huiart ont contribué à une étude collective sur l’hypertension avec des données provenant des études nationales basées sur la population « ORISCAV-LUX » (Observation des Risques et de la Santé Cardio-Vasculaire au Luxembourg) et « EHESLUX » (Étude Européenne sur la Santé au Luxembourg). Cette recherche, dirigée par l’Imperial College London dans le cadre de la Collaboration internationale relative aux facteurs de risque des maladies non transmissibles (NCD-RisC), visait à comprendre si des améliorations en matière de détection, de traitement et de contrôle de l’hypertension ont été réalisées entre 1990 et 2019. Les données disponibles en la matière sont souvent sujettes à des différences méthodologiques, ce qui complique la comparaison de ces aspects entre plusieurs pays. Cette étude visait donc à fournir des données cohérentes, solides et comparables aux niveaux nationaux, régionaux et mondiaux. Les résultats ont été publiés en août 2021 dans la célèbre revue « The Lancet ».

Un diagnostic d’hypertension est posé lorsque la pression artérielle systolique et diastolique est égale ou supérieure à 140 mmHg et 90 mmHg, respectivement. Plus de 8,5 millions de décès dans le monde seraient liés à l’hypertension, qui est une cause directe de pathologies telles que les accidents vasculaires cérébraux, les cardiopathies ischémiques et d’autres maladies vasculaires et rénales. Cependant, l’hypertension peut être facilement décelée par les institutions de soins communautaires et primaires, et plusieurs traitements efficaces et peu coûteux sont disponibles, ce qui réduit le risque de survenue de ses conséquences les plus graves.

« Il n’existe pas de données mondiales comparables permettant d’évaluer quels pays présentent des taux élevés ou faibles de détection, de traitement et de contrôle, et comment ces mesures ont évolué dans le temps. À notre connaissance, cette étude est la première analyse globale et exhaustive des tendances en matière de prévalence, de détection, de traitement et de contrôle de l’hypertension artérielle qui inclut divers pays à travers le monde. En outre, la puissance de cette étude réside dans le processus rigoureux de sélection des données et dans les méthodes statistiques qui ont été conçues afin d’analyser les tendances du traitement de l’hypertension », explique la Dre Ala’a Alkerwi.


Malgré un doublement des chiffres, la prévalence mondiale de l’hypertension est stable
NCD-RisC a pris en compte plus de 1 200 études évaluant la situation de l’hypertension dans un total de 184 pays. L’analyse a révélé que la prévalence mondiale de l’hypertension normalisée pour l’âge chez les adultes (30–79 ans) est restée stable entre 1990 (32 % pour les femmes et les hommes) et 2019 (32 % pour les femmes et 34 % pour les hommes). En 2019, la prévalence d’hypertension la plus faible (moins de 24 % pour les femmes et moins de 25 % pour les hommes) a été enregistrée au Canada et au Pérou, chez les femmes du Japon, de Taïwan et de Corée du Sud, et chez les hommes de certains pays à revenu faible ou intermédiaire, comme la Papouasie-Nouvelle-Guinée et le Cambodge. En revanche, la prévalence d’hypertension la plus élevée a été observée en Europe centrale et orientale, en Asie centrale, en Océanie, en Afrique australe et dans certains pays d’Amérique latine et des Caraïbes.


Sur l’ensemble de la population mondiale, 41 % des femmes et 51 % des hommes n’avaient pas été diagnostiqués comme hypertendus en 2019. Dans ce cas de figure, les pays à revenu élevé se montraient plus efficaces en matière de diagnostic de l’hypertension, et ce tant chez les femmes (plus de 70 %) que chez les hommes (plus de 60 %). Par exemple, entre 27 % et 34 % des femmes et des hommes des régions occidentales et de l’Asie-Pacifique à revenu élevé ignoraient leur état hypertendu. En revanche, c’est dans les pays à revenu moyen et faible, comme ceux d’Afrique subsaharienne et d’Océanie, que le pourcentage de femmes (50–60 %) et d’hommes (près de 70 %) souffrant d’hypertension non décelée était le plus élevé.


En 2019, le taux de traitement mondial était de 47 % pour les femmes et de 38 % pour les hommes. Étant donné qu’en général moins de 50 % des patients traités parviennent à contrôler leur hypertension, le taux de contrôle global pour les femmes et les hommes était donc respectivement de 23 % et 18 % environ. Dans les régions occidentales et d’Asie-Pacifique à revenu élevé, le pourcentage de patients non traités était inférieur à 15 %, avec un contrôle de l’hypertension supérieur à 30 % pour les deux sexes. Il est intéressant de noter que la Corée du Sud, le Canada et l’Islande présentaient les pourcentages les plus élevés de traitement (supérieur à 70 %) et de contrôle (supérieur à 50 %). Par ailleurs, parmi les pays à revenu faible ou intermédiaire, le taux de traitement en Afrique subsaharienne et en Océanie était inférieur à 30 % et, par conséquent, le taux de contrôle était resté inférieur à 13 %.


« Notre nouvelle analyse complète de la prévalence de l’hypertension et de sa prise en charge a montré que, depuis 1990, le nombre de personnes souffrant d’hypertension dans le monde a doublé, l’essentiel de cette augmentation se produisant dans les régions à revenu faible ou intermédiaire », poursuit la Dre Ruiz Castell.Elle ajoute que « néanmoins, nos résultats suggèrent également que la prévention de l’hypertension et l’amélioration de sa détection, de son traitement et de son contrôle progressent dans les pays à revenu élevé et peuvent être améliorés dans les pays à revenu faible et intermédiaire, grâce à des efforts en matière d’éducation à la santé, de formation du personnel de santé et d’un système performant d’achat et de distribution de médicaments. »

Compenser les différences

D’après les données de l’étude NCD-RisC, les différences majeures en matière de détection, de traitement et de contrôle de l’hypertension entre les différents pays pourraient être compensées par la prise en compte des causes indirectes essentielles. L’amélioration de la détection de l’hypertension dans les pays à revenu élevé est principalement due à une amélioration des contacts avec les services de santé (p. ex. une mesure plus fréquente de la pression artérielle) et, en général, à un système de soins de santé mieux établi et plus abordable. Afin d’améliorer également la situation dans d’autres pays, former des agents de santé non-médecins à prendre en charge les maladies non transmissibles (p. ex. par la mesure de la pression artérielle), la mise en place de rendez-vous de dépistage et l’introduction d’une assurance maladie universelle représentent des solutions envisageables. Ces initiatives pourraient contribuer à améliorer le traitement et le contrôle de l’hypertension. La détection et le traitement précoces de l’hypertension élevée pourraient prévenir les complications graves tardives. Cependant, pour que cette stratégie réussisse, elle doit être associée à une baisse du prix et à une augmentation de la disponibilité des médicaments antihypertenseurs les plus courants. En outre, la promotion d’un régime alimentaire équilibré et de modes de vie sains dans les pays à revenu moyen et faible, en parallèle avec une amélioration de leur coût et de leur accessibilité pour les personnes dont les ressources sont limitées, même dans les pays à revenu élevé, contribueraient à réduire la prévalence de l’hypertension et à améliorer son contrôle. Par exemple, dans des pays comme la Finlande, la réduction de la consommation de sel par une combinaison d’interventions fiscales, réglementaires et sociales a permis de contrôler la prévalence de l’hypertension dans la population. De plus, dans les pays à revenu élevé, une disponibilité et une consommation accrues de fruits et légumes pourraient également être partiellement associées au déclin progressif de l’hypertension au cours de ces trois dernières décennies. Il est intéressant de noter que bon nombre de ces initiatives sont déjà en place. Certains pays, comme le Canada, le Costa Rica, la Corée du Sud et Taïwan, sont parvenus à une faible prévalence de l’hypertension ou à un contrôle élevé grâce à l’amélioration de la prévention et du traitement à chaque étape du processus.


Dans l’ensemble, cette étude permettra de renforcer les directives fondées sur des données probantes relatives à l’hypertension et de veiller à ce qu’elles soient actualisées et adaptées aux contextes nationaux,

conclut la Dre Alkerwi.

L’étude a été publiée sous le titre complet « Worldwide trends in hypertension prevalence and progress in treatment and control from 1990 to 2019: a pooled analysis of 1201 population-representative studies with 104 million participants ».

Scientific Contact

  • Dr Ala’a
    Alkerwi

    Department of Population Health Luxembourg Institute of Health

  • Dr Maria
    Ruiz-Castell
    Scientist, Public Health Research

    Department of Population Health Luxembourg Institute of Health

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